La loi 21: Le dogme de l’apparence et le prix de l’inégalité


Le Québec s’est donné une loi pour affirmer sa laïcité, et pour ce faire, il a dû suspendre ses propres Chartes. Ce geste, digne d’un État en pleine crise d'identité, est le symptôme de notre mal profond: nous avons
l’ambition de la République, mais l’âme du presbytère.

Nous regardons la France, avec sa Loi de 1905, et nous ne voyons qu'une chose à imiter: l'interdiction. Mais la laïcité française fut un acte de séparation radicale; une ligne tirée dans le sable qui déclarait l’État aveugle à la foi. Notre Loi 21, pilotée par la CAQ, est à l'inverse, un acte de discrimination très clairvoyant. Elle a choisi ses cibles qui l’aidait à gagner des élections.

L’hypocrisie de la Bourse et de la Soutane


Le génie de l'hypocrisie réside dans sa sélectivité financière. Nous avons créé une laïcité qui s’attaque au portefeuille des minorités et non au coffre-fort des institutions.

L'État est un mécène généreux. Il subventionne à gros coups de millions les écoles privées confessionnelles, reconnaissant de fait que la ségrégation religieuse est un modèle d'éducation acceptable, pourvu qu'elle soit coûteuse et établie. L’argent du contribuable laïque finance la continuité des dogmes. Inversement, l'État est incapable d'assurer un repas neutre dans certains de ses propres hôpitaux, où le standard Casher dicte le menu, imposant à tous une contrainte religieuse institutionnelle.

C’est le prix de notre faux progressisme: nous sommes assez forts pour exiger la nudité symbolique de l'enseignante, mais nous sommes trop faibles pour éteindre le financement d'une cuisine communautaire ou mettre fin aux subventions des établissements confessionnels.


Le principe de l’Égalité dans l’exclusion


La prémisse de la Loi 21 est fausse. Si l'on décrète que le couvre-chef d'une religion, ici le voile ou le turban, est un pêché visuel contre l'autorité de l'État, alors la même rigueur, la même ferveur puritaine, doit s'appliquer à tout signe d'allégeance.

Il est intellectuellement malhonnête de déclarer la guerre au morceau de tissu tout en épargnant la fausse perruque ('sheitel') portée par d'autres croyants orthodoxes. Il est mesquin de traquer l'expression du corps tout en ignorant l'étoile portée au cou. Si nous voulons une république laïque, elle ne peut pas être une affaire de taille de symbole ou de couleur de peau.

De même, si l'on craint l'influence du Halal (l'invisible certification), il faut exiger la dissolution de l'institution la plus visiblement religieuse dans la sphère publique : l'opération Casher subventionnée. L'égalité dans la laïcité, ce n'est pas choisir ses batailles; c'est les mener toutes, ou aucune.

Car, et c’est le principe que l’on cherche à noyer sous le folklore : si l'on s'oppose à une seule religion dans l'espace public, on doit s'opposer à toutes, à égalité. Sinon, ce n’est pas la laïcité, c’est de la xénophobie déguisée en loi.

Le verdict de Bedford: La loi s'est trompée de cible



L'Affaire Bedford restera le sarcasme final, la preuve que l'État s'est fourvoyé dans un miroir aux alouettes.
Dans cette école, le prosélytisme, l'intimidation, les prières actives et les défaillances de gouvernance ont prospéré. Le scandale était celui de la conduite et de l'incompétence managériale. Pourtant, l'enquête a révélé que la majorité des employés soupçonnés de ces dérives étaient déjà conformes à la Loi 21, ne portant aucun signe.

Le verdict est sans appel: la Loi 21 est un leurre. Elle a concentré toute sa force sur l'apparence passive (le voile) en croyant éradiquer l'idéologie active (le prosélytisme). Elle a confondu le symptôme avec la maladie.

L'hypocrisie de la CAQ est de persister à brandir cette loi comme un succès, refusant d'admettre que le problème n'était pas la tête couverte, mais l'incapacité de l'État à gérer ses propres institutions et ses propres employés, indépendamment de leur religion.

Le Québec n'a pas besoin d'une laïcité sélective. Il a besoin d'un État qui a le courage, soit de dire Non à toute forme de religion subventionnée, soit d'affirmer que la tenue du citoyen est libre, pourvu que la conduite soit professionnelle. Toute autre voie, et c'est celle que nous empruntons, n'est qu'une comédie politique coûteuse où le principe de l'égalité est le grand perdant.


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