On nous a toujours dit qu'il fallait faire. Faire de l'argent, faire carrière, faire des enfants, faire la vaisselle. Toujours faire. Mais moi, je vous dis, mes chers vivants, que le plus grand accomplissement de l'humanité, l'acte de résistance le plus pur face à la machine qui nous broie les tripes, c'est de niaiser. De niaiser sans vergogne, sans but, avec cette insouciance grasse et molle d'un chat qui se pogne le bacon au soleil. La vie, t'sé, c'est une immense salle d'attente. De la naissance à la mort, on attend. On attend l'autobus, le salaire, l'amour, le diagnostic. Et dans cette attente perpétuelle, on nous a filé une maudite montre intelligente pour qu'on mesure notre angoisse, qu'on quantifie notre panique. Pour qu'on s'active. Bon Dieu! Mais si on arrêtait de regarder le cadran? Si on la laissait, cette sainte montre, se ramasser dans un tiroir avec les chaussettes orphelines et les promesses fanées? Juliet...